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novembre 2015

Échange de réciprocité, échange réciproque, Libre-échange et échange capitaliste

Dominique Temple

Si je perçois le besoin d’autrui et prends l’initiative de le satisfaire et que l’autre en fasse autant, on peut dire qu’il y a réciprocité de dons. Du point de vue de l’intérêt de chacun, le don paraît insensé, mais la raison en est donnée a posteriori par le fait que la réciprocité crée une valeur nouvelle car le produit de l’action réalisée l’un pour l’autre est une valeur commune : la philia.

Il est possible que l’un des donateurs soit plus généreux que l’autre, auquel cas la réciprocité devient inégale et s’accompagne du prestige qui s’accumule en faveur du plus grand donateur, d’où une hiérarchie sociale en fonction de la contribution de chacun à la création de la valeur commune. L’éthique est alors prisonnière de l’imaginaire du prestige, et bientôt des moyens de s’assurer de sa croissance, ce qui conduit à l’appropriation de ces moyens et à la privatisation de la propriété commune : terre, mines, forêt, ce que Marx appellera : la propriété privée patriarcale, la propriété privée du souverain.

Mais la réciprocité propose une issue à cette aliénation : l’égalité des prestations des uns vis-à-vis des autres. Les hommes égaux en prestige se disent frères. Le sentiment commun engendré par cette forme de réciprocité collective (le partage) est le sentiment de fraternité. Échanger est alors une fonction que tout le monde peut légitimement pratiquer sur le marché puisque tout le monde sait que le prix assure la satisfaction de chacun en raison des besoins de tous. L’échange qui respecte les équivalences de réciprocité est un échange que l’on peut dire juste ou encore échange de réciprocité : c’est l’échange qui prévaudra jusqu’à ce que la propriété soit privatisée et que se développe l’exploitation du travail salarié.

Il est possible de commercer avec qui ne participe pas de sa communauté de réciprocité sans établir pour autant une nouvelle relation de réciprocité et cela dans le seul souci de son intérêt lorsque l’échange proposé correspond à celui que propose autrui : le troc. Le troc diffère de la réciprocité parce qu’il ne se pratique qu’en fonction de son intérêt. L’intérêt de l’autre n’est pris en considération que pour autant qu’il autorise le sien propre : c’est ce que Marx appelle l’échange réciproque. Ce n’est donc pas la même chose de parler d’échange de réciprocité et d’échange réciproque.

Lorsque l’échange est relayé par un intermédiaire, si les deux producteurs se connaissent, ce dernier est payé d’un commun accord pour son service. Mais s’ils s’ignorent, l’intermédiaire peut en profiter pour spéculer. Il devra réaliser quatre échanges (deux échanges avec chacun de ses deux partenaires) pour que les producteurs continuent de s’ignorer et que la spéculation sur la différence des prix entre leurs domaines respectifs demeure lucrative. Cependant, sur un marché où les intermédiaires sont nombreux, la concurrence tendra à égaliser les échanges. C’est le marché de libre-échange.

Mais la spéculation ne désarme pas pour autant. Elle sera relayée par l’exploitation capitaliste grâce à l’institutionnalisation de la propriété privée. L’échange spéculatif est alors reproduit en faveur des propriétaires des moyens de production.

L’accumulation capitaliste est assurée comme on sait par la différence de valeur entre le produit du travail et le salaire qui rémunère la reproduction de la seule force de travail du salarié. Le libre-échange devient l’échange capitaliste.

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